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Le Petit Roi
Un jour, alors que je survolais le Sahara en avion, le moteur de mon véhicule s’est mis à faire un drôle de bruit. J’ai été forcé à atterrir, et, n’ayant ni passager ni mécanicien avec moi, je me préparais à devoir faire face à une réparation difficile. Mais je n’avais pas le choix. Mes gourdes ne contenaient de l’eau que pour huit jours. Je me trouvais à plus de mille milles de toute habitation. Complètement perdu dans le désert. Seul.
C’est à côté de mon avion que je me suis endormi le premier soir. Je pensais, dans mes moments de déprime, ne plus jamais revoir mon pays et finir mes jours seul dans ce désert. Alors, vous n’imaginez pas ma surprise lorsque le lendemain, au réveil…
- S’il te plaît, forme-moi un gouvernement !
La surprise a eu raison de ma nonchalance matinale. Cette apparition m’avait réveillé plus efficacement que l’eût fait une douche froide. Vous pensez bien : le soir, je déprimais en me demandant si j’allais un jour revoir un visage humain, et, le matin, voilà un homme qui me parle ! J’ai sauté sur mes pieds et frotté vigoureusement mes yeux : je m’attendais à le voir disparaître comme un mirage. Mais il est resté bel et bien visible. Et, comme impatient, il a répété :
- S’il te plaît, forme-moi un gouvernement !
Trop surpris pour désobéir, j’ai sorti une feuille de papier et un crayon. J’y ai tracé quelques lettres, puis je l’ai tendu à celui que je venais de rencontrer au milieu du désert. Il a regardé la feuille un instant, puis levé les yeux vers moi. Il n’avait pas l’air satisfait.
- Je ne veux pas de ce gouvernement, il est tombé il y a un an. J’ai besoin d’un gouvernement, un vrai, un solide.
Alors, j’ai essayé d’en former un.
Il regarda attentivement, puis me dit :
- Non, celui-là est trop flamand ! Fais-en un autre.
J’en formai un autre. Il sourit doucement, avec indulgence.
- Mais non, tu vois bien… ces deux partis-là ne s’entendent pas !
Je refis un gouvernement, mais il fut rejeté, comme les précédents :
- Celui-là ne marchera pas, il n’est pas majoritaire. Je veux un gouvernement qui tienne.
Comme je m’impatientais, je fis un dessin que je tendis à l’étrange personnage.
- Tiens, c’est un Parlement. Le gouvernement que tu veux est dedans.
Il se pencha sur mon dessin, l’examina un instant.
- Tu me prends pour un con ? J’y ai déjà cherché mon gouvernement ! A coup de préformateur, clarificateur, médiateurs… C’est le bordel depuis un an, c’est pas avec ce Parlement qu’on va s’en sortir !
C’est ainsi que je fis la connaissance du petit roi.
Hommage à Saint-Exupéry
Tags : gouvernement, j’ai, c’est, moi, jour
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Commentaires
j'ai beaucoup aimé ton texte, parodiant le Petit Prince...notamment la chute. on ne s'attend pas vraiment à ce que le Petit Roi se montre vulgaire et que la chute arrive si vite, au contraire, je pensais -et espérais presque! :p- que le texte serait plus long...bravo. un bon texte.
Super ton boulot !! J'aime particulièrement ce texte-ci !!
Tu as du style ! J'apprécie, c'est pas souvent le cas !!
Hop, dans mes favoris !!!
( j'en profite pour te proposer de faire un tour sur mon blog, où je me permets de publier ma modeste mais insolente poésie ! )Salutations littéraires ma chère !
On dira que j'étais fatiguée...
Ou alors c'est mon coté désespérement féministe...Mais aussi, dans la présentation "blog du jour" c'était écrit "féruEEEEE " alors j'ai tiré des conclusions rapides. Mes sincères excuses.
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Ca cartonne !